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 Introduction



Tout le monde connaît les puzzle-games, ne serait-ce que grâce à Tetris pour les moins jeunes et Candy Crush Saga pour les plus jeunes. Souvent injustement relégués au rang de genre « casual », il n’en demeure pas moins un style de jeux qui n’a jamais été démodé et qui a su évoluer avec son temps.


Note et définition



A noter que « puzzle » signifie en anglais « casse-tête ». Le terme « puzzle » désigne donc parfois l’ensemble des jeux de réflexion, incluant des jeux très éloignés des « puzzle-games » classiques, comme Lemmings, World of Goo ou les puzzle-platformers (Braid, The Lost Vikings). Dans ce dossier, le sens de « puzzle » ne tiendra compte que des jeux « tile-matching » (littéralement : correspondance de tuile), que l’on peut grossièrement séparer en deux groupes : « falling blocks » et/ou « visual matching ».


Falling blocks

Comme son nom l’indique, ce terme désigne un jeu dans lequel des blocs tombent, et c’est au joueur de les organiser comme il peut, en les dirigeant à droite, à gauche, éventuellement en les pivotant ou en accélérant leur chute.


Visual matching

Comme son nom l’indique toujours, ce terme désigne un jeu dans lequel le joueur doit faire se correspondre des blocs ou éléments de blocs visuellement identiques ou semblables, le plus couramment de même couleur.

La plupart des tile-matching sont à la fois des falling blocks et des visual matching (Puyo Puyo, Columns, Klax, etc…), mais certains ne répondent qu’à un des deux genre (Tetris, Bubble Bobble).

A partir d’ici, pour plus de lisibilité, j’utiliserai parfois le mot « puzzle game » ou « puzzle » pour désigner en fait les « tile matching games ».

Histoire



Les origines (1985-1989)

Les prémices des puzzle games sont à chercher du côté des jeux de cartes et de tuiles en solitaire : le shanghai mahjong (à ne pas confondre avec le mahjong) ou le solitaire sont effectivement des jeux dans lesquels le joueur doit faire correspondre des éléments semblables ou similaires dans le but de les faire disparaître. Plus tard, certains jeux de société, comme le Puissance 4, demanderont également au joueur de faire correspondre des éléments de couleur identique.


Les deux premiers jeux vidéo à proposer ce gameplay arriveront relativement tardivement sur le marché du jeu vidéo – en 1984 et 1985 – et il s’agira de deux jeux radicalement différents mais entrants tous les deux dans la définition du tile-matching, et proposant tous deux des éléments de gameplay qui existent aujourd’hui dans la plupart des puzzle-games. Le premier, en Russie, n’est autre que le célèbre Tetris. Le second, au Japon, se nomme Chain Shot!, plus connu aujourd’hui sous le nom de « SameGame ».


Tetris

Je ne vais pas ici raconter le gameplay de Tetris que tout le monde connaît, je vais cependant résumer rapidement l’histoire de ce jeu.

Tetris (Game Boy, Nintendo, 1989)

Le jeu est né en Russie sur l’ordinateur soviétique Elektronica 60 en 1984, créé par le célèbre Alexei Pajitnov, puis porté sur IBM DOS et devint très populaire en Russie, avant de s’étendre petit à petit plus à l’ouest de l’Europe et arriver sur tout le continent. Pajitnov vendit les droits du jeu au gouvernement soviétique pour une durée de 10 ans. En 1996, il récupéra donc les droits sur son bébé et créa « The Tetris Company ».

En 1989, le jeu sera porté sur la Game Boy de Nintendo et son succès, déjà très grand, deviendra alors gigantesque, au point de presque toujours figurer dans les tops 10 des jeux les plus cultes de tous les temps.

Tetris (Elektronica 60, Alexei Pajitnov, 1984)

Tetris (IBM PC, Alexei Pajitnov, 1985)

 

Chain Shot!

En 1985, sortit sur Fujitsu FM-7 et FM-8, des ordinateurs japonais, un jeu nommé « Chain Shot! », développé par ASCII et distribué via leur magazine « Gekkan ASCII ». Dans ce jeu, vous serez confronté à un écran rempli de carrés de différentes couleurs. En cliquant sur un de ces carrés, vous le ferez disparaître ainsi que tous les carrés de même couleur adjacents, seulement si au moins un carré de même couleur est adjacent. Les carrés restants « tombent », prenant la place des carrés éliminés. Le but est de vider l’écran de tous les carrés.

Chain Shot! (FM-7, ASCII, 1985)

Nous avons donc là deux jeux, le premier typiquement « falling blocks », le deuxième typiquement « visual matching », qui serviront de base à la totalité des « tile matching » à venir.

La quasi-totalité des puzzle-games qui sortiront entre 1985 et 1989 seront des clones de Tetris (ou plus rarement, de SameGame), ou proposeront des gameplays avec peu, sinon pas, d’éléments novateurs, et resteront au rang de « petis jeux » sans grande influence sur le genre.

En 1989 et 1990, pourtant, quelques jeux vont révolutionner le genre et lui apporter un vrai vent de fraîcheur, tout en le popularisant.


La première vague de puzzle-game originaux (1989-1990)

Columns / Beyond Columns (1989)

En 1989, Jay Geertsen crée le jeu « Beyond Columns » sur X11, qui sera rapidement porté sur IBM DOS, Windows 3.1, Linux, Mac et Atari ST, avant d’être racheté par Sega en 1990, qui l’utilisera sur ses machines pour tenter de concurrencer le rouleau compresseur Tetris de Nintendo.

Beyond Columns (IBM PC, 1989, Jay Geersten)

Ce jeu est le premier à mélanger parfaitement les gameplays de Tetris et SameGame, et propose au joueur, non plus de pouvoir pivoter ses pièces, mais de modifier l’ordre des couleurs au sein de sa pièce. Les pièces qui tombent sont toutes des pièces de 1x3 (3 carrés verticaux), que le joueur doit placer pour créer des rangées verticales, horizontales ou diagonales de trois couleurs identiques, à la manière d’un puissance 4.


Puzznic et Plotting / Flipull (1989)

Ces deux jeux, semblables, sont sortis la même année. En 1989, Taito édite Puzznic et Plotting sur arcade. Dans les deux cas, la partie commence avec un arrangement de pièces, chacune comportant un symbole, le but du jeu est de faire disparaître toutes les pièces à l’écran en effectuant des correspondances. Dans le premier, on déplace les pièces individuellement (dès que deux pièces semblables se touchent, elles disparaissent). Evidemment, pour déplacer ses pièces, il faut que l’espace soit libre, il importe donc de choisir judicieusement l’ordre des pièces à éliminer. Dans le second, on dirige un petit personnage à gauche (ou à droite selon les versions) de l’écran, qui devra jeter une pièce sur l’arrangement afin de faire disparaître, là encore, des pièces similaires et adjacentes.

Puzznic (Arcade, Taito, 1989)

Plotting (Arcade, Taito, 1989)

 

Dr. Mario (1990)

L’année suivante, Nintendo crée son propre puzzle-game en visual-matching par le biais de Dr. Mario. A l’instar d’un Columns, ce jeu mélange falling blocks et visual matching, tout en conservant le pivotement des pièces issu de Tetris. Cette fois, il s’agira de détruire des microbes grâce à des pilules de même couleur.

Dr. Mario (NES, Nintendo, 1990)

 

La profusion de puzzle-game

A partir de là, les puzzle-games vont pulluler sur machines de jeux. Ils seront tous influencés par les jeux précédemment cités, et on peut les regrouper en 3 catégories :

* Falling blocks, inspirés de Dr. Mario / Columns : Klax en 1990, Puyo Puyo en 1991, Baku Baku Animal en 1995 ou Super Puzzle Fighter II Turbo en 1996.

Klax (Arcade, 1990, Atari)

Puyo Puyo (Arcade, Sega, 1991)

Baku Baku Animal (Arcade, Sega, 1995)

Super Puzzle Fighter II Turbo (Arcade, Capcom, 1996)

 

* Tiles shooting, jeux dans lesquels l’on doit envoyer des carrés sur ceux existants, inspirés de Plotting : Puzzle Bobble en 1994, Magical Drop en 1995 ou Zuma en 2003.

Puzzle Bobble (Arcade, Taito, 1994)

Magical Drop (Arcade, Data East, 1995)

Zuma (PC, PopCap Games, 2003)

 

* Tiles swapping, jeux dans lesquels l’on doit déplacer des carrés, inspirés de Puzznic : Shariki, en 1994.

Shariki (PC, Eugene Alemzhin, 1994)

Comment, vous ne connaissez pas Shariki ? C’est pourtant celui qui inspirera le puzzle-game le plus populaire aujourd’hui, et qui contribue largement au fait que de nombreux joueurs se revendiquant « hardcore gamers » estiment que les puzzle game sont l’apanage des « casual gamers », je veux bien entendu parler de Candy Crush Saga.

Candy Crush Saga (Facebook, King.com, 2012)

 

Il s’agit donc d’un jeu présentant un agencement de carrés de couleurs, à la manière de SameGame, mais cette fois, il ne suffira plus de cliquer sur un carré pour les faire disparaître : il faudra faire pivoter deux pièces adjacentes. Un gameplay qui s’adapte parfaitement aux écrans tactiles des téléphones et tablettes et explique en grande partie le succès colossal de Candy Crush Saga (la deuxième explication de son succès sera expliqué dans la partie suivante de ce dossier). Cependant, on n’est pas passé directement de Shariki à Candy Crush : entre les deux, de nombreux jeux proposeront le même gameplay : Panel de Pon / Tetris Attack en 1995, Bejeweled en 2001, Puzzle Quest et Jewel Quest en 2007, Jewel Match et Gyromancer en 2009, Puzzle and Dragons en 2012 et HuniePop en 2015 pour ne citer que les plus connus.

Panel de Pon (Super NES, Nintendo, 1995)

Bejeweled (PC, PopCap Games, 2001)

Puzzle Quest (PSP, Infinite Interactive, 2007)

Gyromancer (PC, Square Enix, 2009)

Puzzle & Dragons (Android, GungHo, 2012)

HuniePop (PC, HuniePot, 2015)

Eviter l’essoufflement du genre

Personne ne pourra le contredire : les puzzle-games, c’est bien, mais c’est répétitif. Les parties de Tetris ou Columns ont beau s’enchaîner, le joueur a beau se perfectionner, il n’en demeure pas moins que rien ne ressemble plus à une partie de Tetris que la précédente. Pour éviter ce phénomène et permettre au joueur de mieux sentir son amélioration dans la maîtrise du gameplay, le genre va voir naître, petit à petit, plusieurs ajouts.


Les différents modes de jeu

Il est souvent plus jouissif de battre un adversaire plutôt que de battre un hi-score, et c’est ce que proposera Tetris sur Game Boy, en 1989, grâce à un mode link. Par la suite, la quasi-totalité des puzzle-games proposera un mode deux joueurs.

D’autres modes de jeu feront leur apparition : time attack (atteindre le meilleur score en un temps donné), puzzle (résoudre des casse-têtes de plus en plus difficile), etc… Tout ceci permettra de proposer aux joueurs des expériences de jeu toujours différentes.


Les niveaux / missions

Plotting, Dr. Mario ou Puzznic vont mettre à disposition du joueur des niveaux de difficulté croissante. Alors que le premier écran de microbes de Dr. Mario sera simple à résoudre, le joueur se verra confronté à des « puzzles » de plus en plus difficiles et exigeants. Ce système permettra au joueur d’avoir une tâche à accomplir, celle de progresser jusqu’au niveau et terminer le jeu, plutôt qu’un simple « hi-score » à dépasser.

Petit à petit, ce système sera étoffé, jusqu’à disposer dans Candy Crush Saga d’une carte du monde, d’objectifs à atteindre sur chaque niveau, de bonus à accumuler pour se sortir des situations les plus délicates, etc…


Le mélange de genres

Les premiers puzzles games à mélanger les genres le font de manière un peu approximative : Tsuukai Slot Shooting, en 1996, mélange puzzle et shooter, tandis que Noon et Devil Dice, en 1998, ou Mr. Driller en 1999, mélangent puzzle et action. Les résultats sont intéressants, mais pas si convaincants. Ce n’est qu’à partir de 2007 que le mélange de genres va trouver grâce aux yeux des joueurs, grâce à Puzzle Quest, qui propose de mélanger le tile-matching (à la Shariki) et le RPG, via un système de quêtes, de niveaux de personnages, de capacités à apprendre, etc… De nombreux jeux s’en inspireront et proposeront ainsi un mélange des genres puzzle / RPG : Might & Magic Clash of Heroes et Gyromancer en 2009 ou Puzzle & Dragons en 2012 pour ne citer que les plus connus.


Conclusion

Bien que nés tardivement (après les jeux de plate-formes, les shoot 'em up, les RPG ou les jeux de stratégie par exemple), les puzzle-games tile-matching sont très rapidement devenus populaires, notamment grâce à Tetris sur Game Boy, et ont pullulé sur toutes les machines de jeux depuis leur apparition. Bien que, sur les machines les plus récentes, ils demeurent cantonnés au dématérialisé, ils gagnent aujourd’hui surtout le cœur des joueurs occasionnels, notamment grâce au succès colossal de Candy Crush Saga sur Facebook et smartphones / tablettes. Il n’en reste pas moins qu’il sont souvent des jeux exigeants, mettant habituellement les réflexes des joueurs à rude épreuve, et que certains opus, comme l’excellente série des Tetris The Grand Master, sont exclusivement à destination des joueurs les plus aguerris et prouvent, s’il en était encore besoin, que le genre n’est pas fermement lié au casual gaming.

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