Aujourd'hui c'est déjà une forme d'art, si on considère l'art dans un sens très large. J'estime les "jeux premiers" plus proches de l'art, de part la démarche créative qu'ils ont impliqués. Certes les jeux actuels ont souvent une jouabilité mieux réglée, ils sont bien plus beaux, mieux finis mais en terme d'évolution c'est tout autre chose. Il y a surtout cette volonté, ce phantasme de se rapprocher du cinéma... C'est là que le bât blesse. Un jeu ce n'est pas du cinéma. Ce qui le caractérise c'est avant tout ce qu'il exprime par le biais de l'interaction entre le(s) joueur(s) et le programme. L'ajout d'éléments cinématographiques est devenu trop systématique, au point de nuire au jeu et à la création. Les budgets explosent. Aujourd'hui le jeu est calqué sur Hollywood, donc de l'esbroufe. Trop axé sur le pur divertissement. Le cinéma n'est en aucun cas un moyen d'expression ultime, c'est un média comme un autre, alors pourquoi le jeu devrait-il s'y conformer ? Je suis certain qu'il y a bien d'autres choses à exprimer par le biais du jeu vidéo qui doit dépasser ce stade pour devenir réellement mature.
C'est en ce sens que je pense que les "jeux premiers" étaient plus créatifs car sans modèles, il fallait tout créer, l'élan artistique était intense en pleine effervescence, la limitation principale étant matérielle la recherche du concept primait, aujourd'hui c'est l'inverse l'élan créatif est réduit au minimum, plus que jamais le jeu vit sur le tapis roulant du progrès informatique et de l'épate visuelle. La crise actuelle n'est pas prête de cesser tant que l'on suivra cette voie. Attention, je ne pense pas que tout ce qui sortait était génial, loin de là, au fond les comportements des auteurs et des éditeurs étaient les mêmes qu'aujourd'hui, quand un jeu était un succès commercial tout le monde s'engouffrait dans la brèche. Seulement le rythme de création était bien plus rapide, 3 mois à 2 ans pour créer un jeu. Aisément rentabilisable de par leur faible coût de développement, les éditeurs étaient moins regardant quand au contenu des jeux. Ces 2 facteurs, intense renouvellement, et souplesse éditoriale facilitait l'émergence de nouveaux concepts. Néanmoins je ne suis pas certain que les auteurs, s'ils avaient carte blanche, renouvelleraient d'une façon drastique le paysage vidéoludique. Les auteurs ont aussi leur responsabilité, mine de rien.
Éric Chahi avait déjà tout dit !
Éric Chahi avait déjà tout dit !
J'ai retrouvé une vieille interview de ce génie du jeu vidéo, ça rejoint exactement ce que je disais récemment sur un autre topic, même si il reste des exceptions, notamment sur switch et chez Nintendo, le média propose avec le temps de plus en plus de films interactifs qu'on nous fait fait passer pour des jeux. Et la faute en revient autant aux producteurs/développeurs qui sont de moins en moins dans la créativité, qu'à la connivence des joueurs de nouvelle génération qui sont arrivés après la ps1 et qui n'ont pas connu l'époque du gameplay ancestral.
"Avec le canon d'un flingue entre les dents, on ne prononce que les voyelles"
MY FEEDBACK
MES RECHERCHES
MA COLLECTION
MY FEEDBACK
MES RECHERCHES
MA COLLECTION
- marmotplay
- Maître de l’Univers
- Messages : 5638
- Inscription : 26 nov. 2020 11:29
Éric Chahi avait déjà tout dit !
Il pointe un élément important: la facilité à rentabiliser un jeu.
Mais bon, je trouve bizarre le reproche de jeu cinématographique parce que pour moi Another World c'est un peu le commencement de çà.
Mais bon, je trouve bizarre le reproche de jeu cinématographique parce que pour moi Another World c'est un peu le commencement de çà.
Éric Chahi avait déjà tout dit !
Another World c'est un héritier d'un genre qui a fait fureur sur micro notamment via des éditeurs français: l'arcade-aventure. Back to the Golden Age, Targhan etc... La maniabilité n'était pas toujours parfaite mais l'intérêt bien réel.
On peut dire merci à prince of persia ressorti de la naphtaline Apple2 et porté sur tous les micros en 1990.
On peut dire merci à prince of persia ressorti de la naphtaline Apple2 et porté sur tous les micros en 1990.
Éric Chahi avait déjà tout dit !
ah non du tout, mis à part les superbes cinématiques, son objectif prioritaire en faisant le jeu c'était de faire vivre un dépaysement total et sensoriel au joueur, sensation de solitude, d'inconnu, pas de tuto, aucune information sur l'écran. On est lâché en milieu hostile. On découvre, on meurt, on fuit, on apprend, on se bat.marmotplay a écrit : ↑25 août 2022 14:33Mais bon, je trouve bizarre le reproche de jeu cinématographique parce que pour moi Another World c'est un peu le commencement de çà.
Il y avait des choses encore jamais vues dans un jeu, et beaucoup de nouveaux éléments de gameplay à acquérir. Dès le début on apparait au fond d'un lac et il faut sortir de l'eau ensuite on doit courir pour échapper aux larves qui nous attaquent du sol ou tombent du plafond, mais on peut aussi être patient et les tuer, puis on tombe nez à nez avec le monstre de la caverne, on ne sait pas encore qu'il faut fuir et qu'on ne peut pas le tuer. On court, on saute, on s'accroche à une liane qui nous fait revenir de l'autre côté de la créature, on recommence à courir sans savoir où l'on va. Et on est miraculeusement sauvé par un sombre inconnu. Viens la scène de la capture, on se réveille hébété dans une cage, il faut quelques secondes pour comprendre que personne ne viendra nous sauver cette fois et qu'il va falloir s'échapper par nos propres moyens, et ainsi de suite, une succession de nouvelles situations nous attend, pour une expérience hors du commun.
Et n'oublions pas que c'est un mec tout seul dans son garage qui a pondu ça, avec les outils actuels ça parait simple, mais à l'époque c'était des entreprises de plusieurs dizaines de salariés et du matos de pointe qu'il fallait pour sortir des productions moins impressionnantes que celle ci.
Alors oui, aujourd'hui ça n'impressionne plus, mais à l'époque c'était du jamais vu, ça repoussait les limites de ce que l'on imaginait pouvoir faire dans un jeu vidéo (on était seulement à quelques années de pong hein, l'évolution était fulgurante, la créativité en ébullition), comme d'autres le feront plus tard (mario64, shenmue, botw, etc...).
"Avec le canon d'un flingue entre les dents, on ne prononce que les voyelles"
MY FEEDBACK
MES RECHERCHES
MA COLLECTION
MY FEEDBACK
MES RECHERCHES
MA COLLECTION
Éric Chahi avait déjà tout dit !
Ce qui était novateur dans Another World outre la direction artistique géniale, c'était la jouabilité qui s'adaptait de manière fluide aux situations. Il n'y avait pas un sprite avec sa panoplie d'étapes d'animation, c'était un personnage qui commençait par nager, sortir de l'eau, mettre des coups de pied, sauter un précipice pour éviter un fauve sans pouvoir le tuer, agiter sa cage et tirer au laser, rouler dans un réseau de tuyaux, etc et là je ne parle que des 10 premières minutes de jeu.marmotplay a écrit : ↑25 août 2022 14:33Il pointe un élément important: la facilité à rentabiliser un jeu.
Mais bon, je trouve bizarre le reproche de jeu cinématographique parce que pour moi Another World c'est un peu le commencement de çà.
Le reste, à savoir l'intro animée très célèbre et les cinématiques qui entrecoupent l'action ça existait déjà depuis les jeux LaserDisc. D'ailleurs c'est le portage Amiga de Dragon's Lair qui a inspiré Éric Chahi pour développer son moteur polygonal.
Bref, Another World n'est pas novateur pour ça, il est surtout fascinant parce que la technique sert l'innovation, et non l'inverse.