Allez, pour une fois c'est moi qui squatte un topic de Wiiwii
Grandia (PlayStation, 1999 au Japon et 2000 en France)
La découverte, la passion éphémère et l’oubli prématuré.
Grandia a d’abord vu le jour sur Saturn en 1997. Et heureusement qu’il a eu droit à sa version PlayStation deux ans plus tard, qui l’aurait connu, sinon ? Pauvre Saturn, si mal aimée, si peu vendue. Bref, je l’ai découvert chez mon meilleur pote, qui savait dénicher des perles vidéoludiques sur PlayStation, je n’ai jamais trop su comment. Le mec de sa grande sœur, je crois. Je ne serais pas étonné d’apprendre un jour qu’il gérait un trafic de jeux piratés de grande envergure. Enfin voilà, mon pote me sortait toujours des RPG japonais en CD gravé qu’on ne pouvait lancer qu’avec l’Action Replay, ce petit boîtier magique qui se branchait à l’arrière de la console (ou sur le côté, je sais plus). Il m’a fait connaître
Breath of Fire 3 comme ça,
Final Fantasy Tactics,
Legend of Kartia,
Vagrant Story… et d’autres. Une fois sevré d’Ocarina of Time, il a direct replongé pour ce gros morceau nommé Grandia. J’ai adhéré aussi, je l’ai regardé jouer mais pas tant que ça ; parce que pour une fois, j’ai attendu qu’il me le prête pour le tester moi-même. Ça m’a bien plu, je me voyais déjà le terminer sans souci… et puis j’ai stoppé net, je ne me rappelle même pas pourquoi. Sûrement à cause de
Gran Turismo 2 en vrai, ou
Tony Hawk, mais je n’ai plus de moment précis en tête. J’arrive, je lance une playthrough YouTube pour faire genre j’ai terminé le jeu, et on en reparle.
Réappropriation du jeu
OK, Grandia se lance ! Tiens, on a droit à des voix pendant les dialogues ? Je ne me souvenais pas. Je trouve ça un peu agaçant, en tout cas en anglais. Heureusement, ça n’arrive pas à chaque conversation, quelle galère sinon ! Et il aurait fallu trois ou quatre CD de plus pour stocker les fichiers audio. Par contre les portraits avec les expressions faciales, c’est sympa (et moins clivant que dans
Legend of Kartia). Allez, on rencontre le protagoniste principal : une sorte de gamin arrogant et mégalo qui se prend pour le meilleur aventurier du monde, alors qu’il n’a jamais dépassé la première plaque d’égout de sa rue. Il rêve de révolutionner la discipline, quand bien même son père et son grand-père ont joué aux explorateurs avant lui… et ont perdu. Ils sont morts, quoi. Je ne sais pas si les développeurs l’ont souhaité ainsi, ou si je fais juste le difficile, mais j’ai du mal à m’attacher à ce genre de gars. Qui aurait envie de se barrer à l’autre bout de la planète, à braver mille et un dangers aux côtés d’un mecton aussi insouciant et prétentieux ? Sa pote qui l’idolâtre ne s’en sort pas beaucoup mieux, remarque, dans le genre gamine niaise et euphorique pour que dalle. Ouais, ça doit venir de mon seuil de tolérance très bas, admettons. Bon, à part ça, j’adore le concept : mettre l’aventure au premier plan, plutôt qu’un scénario alambiqué, des mécaniques complexes, ou juste le besoin d’aller taper des méchants ; original et bien vu. OK, on aurait pu avoir tout ça en plus de l’aventure, mais bon. J’arrête de râler. Grandia parvient à transmettre son amour pour la bougeotte comme aucun autre titre que j’ai connu. Franchement, qui fait démarrer son perso principal avec un tablier en guise d’armure, un couvercle de marmite en lieu et place du bouclier, une casserole sur la tête, et une épée en bois ? Et que ça passe crème en plus ? Gros tour de force. Évidemment, ça évolue vite vers du classique, et on termine engoncé dans une cotte de mailles forgée par des dieux, une arme enchantée cinq cent fois par les plus puissants sorciers, en se trimballant des artefacts millénaires qui lancent des tornades de flammes à tout va. Dommage de ne pas avoir tout misé sur l’originalité du début, même si ça reste un détail. Mais j’aurais aimé que Grandia aille à fond dans le délire, et que même à la fin du jeu, nos héros se tapent avec une fourchette légendaire, ou se protègent le crâne avec une passoire en métal étoile. Tant pis.
La prise en main se fait on ne peut plus facilement. Ça ressemble pas mal à
Secret of Mana, dans la manière de gérer les combats en “presque temps réel”, avec une barre d’initiative qui demande quand même un poil de réactivité de notre part. Le système de progression m’a paru ultra conventionnel également, mais logique et efficace. On augmente sa maîtrise d’arme en l’utilisant, on améliore ses sorts en les lançant, et on en débloque d’autres du même élément. Il me semble que plus on occasionne de dégâts lors des fights, plus on progresse vite, mais je peux me tromper. Et je ne vais pas me refaire le jeu moi-même juste pour clarifier ce point, ça va aller. On gère un groupe de combattants, entre un et quatre, aux profils divers et variés (mais en gros, guerrier, mage ou support). Ce qui m’emmerde dans ce système, c’est qu’on ne choisit jamais qui on peut embarquer ou non. Les gens arrivent et s’en vont au gré de l’histoire. Ça rend le tout plus réaliste (comme l’abandon du tablier, à mon grand regret), sauf que contrairement au système de progression, ici le réalisme empiète sur la coolitude, donc non. Franchement, on nous fait incarner une meuf super cool depuis le début du jeu, et au bout de vingt heures, elle quitte la troupe pour ne plus jamais la réintégrer. VINGT HEURES à s’attacher au perso, et on doit l’oublier. Pourquoiiiiii ? Bon, en même temps je comprends, qui a envie de se coltiner ce branleur de Justin pour traverser la planète ? Non, je lui en aurais plutôt collé une pendant qu’il se balade sur le bord d’une falaise, et pas pour le mettre en sécurité.
Donc voilà, on entre dans la boucle classique : rencontre avec des gens, combat, récupération de stuff, avancée dans le scénario, nouvelle zone, rencontre avec des gens… etc. Mais si on chouine un peu quand tel ou tel compagnon charismatique se casse, on ne s’en lasse pas. Les rebondissements apparaissent suffisamment souvent pour qu’on reste en haleine, si tant est qu’on apprécie le caractère relativement enfantin de l’univers. On vit une aventure épique, on croque la vie à pleines dents, faisant fi de toute responsabilité imposée par le quotidien déprimant des gens normaux ! Pas de charge mentale, pas de factures, pas de perquisitions de flics toutes les semaines ! Le tout dans une ambiance rétro-futuriste souvent très inspirée. Les trains à vapeur côtoient les forteresses volantes, les navires de guerre tout droit sortis de la seconde guerre mondiale, et les entités bio-mécaniques. Sans oublier les phases mystico-onirico-spirituelles dans des décors coincés entre deux dimensions. Il en faut toujours, de ces délires métaphysiques, sinon on n’appellerait pas ça un vrai JRPG, hein ? Bon, les graphismes ne font pas franchement honneur à tout ça, dommage, ça reste assez limite pour de la PS1 en 2000 (même si le jeu a déjà trois ans quand on le découvre chez nous, d’accord). Tiens, pendant que je parle de JRPG, petite parenthèse sur les femmes. Il y en a toujours eu OK, mais là, on dirait qu’il y en a plus que la moyenne (c’est quasi du 50/50 avec les hommes, honnêtement). Et on les voit à des postes plutôt importants. Bon, ça ne veut pas dire que Grandia passe le test de Bechdel, loin de là. Les trois capitaines qui ne parlent que de leurs boobs ou de leur amiral trop beau, la love interest qui passe d'aventurière indépendante à carpette pleurnicheuse parce qu’elle kiffe sur le héros (qui ne s’en rend même pas compte alors qu’il la kiffe aussi, ce débile). Les rites de passage, du style le gros guerrier qui veut faire grandir le protagoniste en le forçant à le battre en duel. COMME UN HOMME ! Pffffffff ouais, la magie des nineties, quoi.
Bon à part ça, qu’est-ce qu’on a d’autre ? En vrac : des esprits à sauver, des méchants pas si méchants que ça, plusieurs choix possibles lors de dialogues (je n’ai pas l’impression que ça influence l’histoire). Beaucoup de cutscenes et discussions, des relations entre les personnages plutôt bien construites sur la durée, et pas trop trop bâclées. Une entité militaire toute puissante qui cache plein de secrets et complote contre le monde entier, en mode Magisterium de la Croisée des Mondes. Un génocie de corbeaux anthropomorphes, un mur infranchissable qui cache une énorme partie du monde au commun des mortels (on le franchit quand même, évidemment). Des niveaux bien sympas malgré la pauvreté des graphismes. La session en bâteau fantôme, des ruines oubliées avec leur atmosphère ultra flippante, la Misty Forest qui réussit son entrée dans le panthéon des stages en forêt super stylés, d’autres régions plus ou moins barrés… etc. Certains monstres ont vraiment des tronches pas possibles. On n’atteint pas le niveau des FF, mais pas loin. Le bestiaire des JRPG a toujours eu ce truc inimitable (les anguilles fantômes de la Misty Forest sont juste géniales). Et dans tout ça, j’ai réussi à ne pas parler de la Spirit Stone que Justin possède depuis la mort de son père, et qui est la clé de tout. Preuve que je n’ai pas touché au jeu depuis plus de vingt ans, et que je tiens à livrer un test superficiel au possible.
Nouvelle plongée dans l’OST
La bande son nous vient d’un certain Noriyuki Iwadare, connu pour ses travaux sur Grandia justement. Mais aussi Lunar, Soleil et plus récemment le Super Smash Bros Ultimate sur Switch. Carrière plutôt respectable, donc. Le générique du début fait penser à la Croisière s’amuse, d’accord. Ne portons pas de jugement hâtif, même si je me retiens de lâcher une petite vanne. Pour une bonne partie des autres titres, je note une très forte influence des musiques d’anime. Écoutez les morceaux sans le gameplay, et ne me dites pas que vous n’avez pas d’images mentales de longs métrages de Miyazaki ou d’épisodes d’Evangelion qui se superposent. Peut-être justement parce que cette B.O. joue sur l’aspect aventure aussi. En général, toutes les compos dégagent une vibe joyeuse et épique, rien de sombre ou déprimant, à quelques exceptions près (quand ça concerne des filles souvent, expldr). Et bien sûr, il y a le fameux morceau de la forêt qui tient son statut au-dessus du lot à la perfection. Mais je préfère parler du thème de la ville natale du héros, qui détermine à lui seul toute l’ambiance du reste du jeu. Des cornemuses enjouées, une mélodie qui met une pêche de dingue, des arrangements à la bonne humeur contagieuse… franchement, je prends mon sac, mon couvercle de poubelle, et je pars à l’aventure direct. Allez salut !
Grandia - Town of Parm
Regrets ou pas ?
Moi qui suis resté bloqué dans la pré-adolescence, j’aurais vraiment dû forcer un peu pour au moins me faire le premier CD.
Tony Hawk et ses potes tout aussi branleurs que Justin auraient bien pu patienter un peu, vu le temps que j’ai passé à les faire s’éclater par terre, en foirant mes figures défiant les lois de la physique. Dans mon vécu vidéoludique saturé par les RTS sur ordi et les jeux de fight / de course sur console, voilà un vent de fraîcheur qui aurait fait du bien à mon ouverture d’esprit. On aurait pu s’enflammer dans des débats interminables avec mon pote, et on aurait joué à Grandia II ensemble sur PS2, autre chef-d’œuvre que j’ai tout aussi honte d’avoir manqué. Et on aurait pris un appart, et on vivrait toujours sous le même toit aujourd’hui, à se faire des sessions de
Golden Axe, de Diablo IV, ou de plein de JRPG rétro super classes, importés par son beau-frère trempant dans des bails un peu sombres, là. OK, j’enlève Diablo IV de la liste. Sûr et certain qu’on se serait éclatés comme des oufs, en tout cas. En voilà une idée intéressante d’univers parallèle, tiens.
Tiens, quelqu'un sait pourquoi j'ai pas la même image de boîte que Wiiwii, alors que ce sont bien deux jeux PAL et PS1 ?