Disclaimer : ce texte fait partie des
50 jeux les plus nostalgiques de mon enfance, et ne se considère pas comme test exhaustif du jeu en question. Il se focalise plutôt sur l’aspect marquant et les bons souvenirs liés à sa découverte quand j’étais gamin. Ce n’est donc pas un test à proprement parler, mais plutôt une virée nostalgique à ne pas trop prendre au sérieux.
Tony Hawk’s Pro Skater 2 (Playstation, 2000)
Type de jeu
Véritable drame de société, qui obligea les adolescents à reproduire dans la vraie vie les acrobaties improbables du jeu.
Premier contact
On avait déjà usé le premier opus jusqu'à la moëlle avec un pote ; si bien qu’on avait décrété qu'on se jetterait sur sa suite avant même d’apprendre son existence. Et connaissant la capacité du mec à obtenir de ses parents le jeu de son choix, au moment de son choix, je n’ai pas été surpris de débarquer chez lui et de le voir jubiler sur ce jeu faisant l’apologie de la coolitude par la mise en danger de soi et d’autrui. Véritable bible pour de jeunes lycéens en pleine construction comme nous.
Retour sur expérience
À l’époque, rejouer au même titre, agrémenté de quelques features en plus et de graphismes un tout petit peu moins moches, ça ne dérangeait pas grand monde. La plupart des suites ressemblaient à des DLC plus ou moins fournis. On nous resservait tout pareil que le jeu précédent, mais en un peu mieux. Parfois en beaucoup mieux, comme pour le cas de Tony Hawk’s Pro Skater. Plus de personnages, plus de figures possibles, plus de matos, plus de niveaux, plus de musiques… bien sûr qu’on allait tout recommencer ! Prenez notre argent, bordel ! Enfin, celui de nos mamans. Nous voilà donc repartis pour des heures à s’acharner sur les nouveaux stages, tenter d’atteindre la limite de score qui permet de débloquer le stage d’après, et choper les collectibles secrets. Avec un peu de chance, gagner aussi de quoi s’acheter une meilleure planche, et améliorer les compétences de nos avatars pour qu’ils se cassent la gueule un tout petit peu moins souvent.
Flashback spécial ambiance
Il se dégage de ce jeu une vibe très urbaine… ouais, sans déconner ! Cela correspondait tout à fait à ce qu’on pouvait voir dans la vraie vie. Les gens faisaient surtout du skate dans la rue, la ville tout entière transformée en un gigantesque terrain de jeu. Bon, contrairement au monde virtuel, si on roulait sur des poussettes et qu’on sautait par-dessus trois bus à la suite, la police rappliquait assez vite. Mais skater signifiait avant tout se la raconter en adoptant un mode de vie bien particulier, et en se forgeant une identité sociale aux codes bien définis. Avec mes copains, on avait plutôt basculé dans le roller, un grand rival du skate (cela servait parfois de prétexte pour des bastons ; enfin je veux dire, les skateurs nous tapaient dessus, pas l’inverse), mais on frimait tout pareil. On sautait par-dessus trois marches en faisant un tour sur nous-mêmes et on s’imaginait défier les lois de la physique comme dans le jeu. Parfois, on tombait et on saignait, comme dans le jeu aussi, sauf que nos croûtes ne disparaissaient pas en une seconde.

Réécoute de la bande-son
Je ne sais pas si ça se passait partout comme ça, mais là où j’ai grandi, on n’écoutait pas n’importe quel genre musical en fonction de notre style vestimentaire. Les skateurs kiffaient en majorité le rock / punk / métal, tandis que le rap restait réservé aux “cailleras”, les gars des quartiers chauds (ou qui faisaient semblant de venir d’un quartier chaud), habillés en survets de sport. Tout manquement à la règle pouvait mener à une sévère punition ! Exclusion du groupe d’amis, insultes, tabassage… voilà notre lot quotidien (en vrai, ça se passait souvent très bien, tant qu’on respectait les conditions). Quelle ne fut pas notre surprise d’entendre autant de rap que de rock pendant nos parties de Tony Hawk 2 ! Mais alors, un tel sacrilège pouvait exister sans créer d’émeute mondiale ? Sérieux, cette révélation divine qu’on a pris dans la tronche, ce jour-là ! Dès lors, j’ai commencé à assumer de porter de baggys troués trois fois trop grands, tout en écoutant le Suprême NTM et Dr. Dre, alors que je le faisais en cachette jusque-là. Au lycée, tandis qu’un groupe de gars me houspillait à cause de mes grosses pompes et mes cheveux longs, un autre mec a débarqué le doigt en l’air pour annoncer :”Ouais, c’est un skatosse de merde, mais il écoute du rap !” Gros blanc dans la conversation, puis tout le monde m’a laissé tranquille d’un coup, comme si j’avais acquis une sorte de statut improbable, me rendant ainsi invisible. Ça valait toujours mieux qu’une arcade sourcilière ouverte et trois dents de pétées tous les mois. Heureusement, les mentalités ont changé. Je crois.
Dub Pistols - Cyclone
Moment Nostalgie
Quand on devient ado, on commence à sortir le soir. Quand on est ado geek, sortir le soir peut se résumer à squatter la console chez des potes toute la nuit. Comme ma mère partait tous les week-ends à cinquante bornes de là pour construire sa future maison, sortir le soir signifiait rester chez moi à accueillir les copains. J’avais l’appart pour moi tout seul une petite centaine de jours par an. Trop de la bombe de balle, wesh ! (expression de l’époque servant à indiquer notre grande appréciation de quelque chose). Je n’allais pas me prendre pour un gangster dans les rues du Havre pour autant. La plupart du temps, mon acolyte ramenait son CD-ROM de Tony Hawk 2, et si on ne succombait pas à la tentation de bifurquer sur
Gran Turismo 2, on pouvait passer des heures à concevoir nos propres niveaux pour les tester ensuite. Ils étaient buggés et complètement dénués de cohérence, mais on les aimait. On pouvait enfin se la péter en ridant dans NOS créations, rien d’autre n’avait autant d’importance dans la vie… à part écouter la Fonky Family avec des Vans démesurées aux pieds.

Instant le plus stylé
Terminer la création d’un skate-park, ajouter les “gaps”, ces bonus donnés à des figures effectuées à des endroits précis, choisir notre meilleur skateur, le lancer à l’assaut d’une rampe… et le voir traverser le décor en retombant la tête à l’envers, mais sans chuter. On pouvait donc le faire tourner à l’infini, augmentant ainsi notre score jusqu’à atteindre des valeurs totalement délirantes. Sauf qu’on ne pouvait jamais s’arrêter, et voilà notre perso condamné à pirouetter sur lui-même pour l’éternité, sans récolter le fruit de ses efforts surnaturels.