MechWarrior 2 : 31st Century Combat (PC, 1995)

La découverte, la passion éphémère et l’oubli prématuré.
Entre 1994 et 1998, mon cousin m'a montré un paquet de jeux PC, des valeurs sûres comme Command & Conquer et Dungeon Keeper, aux machins plus obscurs comme Subculture ou M.A.X. MechWarrior se situe plutôt dans la première catégorie, enfin je crois. D'ailleurs, mon cousin possédait aussi le jeu de plateau BattleTech, d'où proviennent les robots qu'on incarne sur l'ordi. On en a fait quelques parties, galvanisés par nos défaites cinglantes sur le jeu vidéo. J'ai aussitôt succombé au concept d'énormes méchas se foutant sur la tronche dans des décors désolés. On a persévéré plus longtemps sur celui-ci que sur pas mal d'autres titres qu'il m'a fait découvrir. Et puis, la frénésie des nouveautés aidant, j'ai consenti à tourner la page. Aussi parce que j'étais super nul, d'accord. Mais ! MechWarrior 2 a creusé une petite place dans ma tête pour s’y installer durablement. De temps en temps, il m’envoie de petits signaux nostalgiques en me réclamant de relancer une partie. Sauf que, pas moyen que je souille mes demi-souvenirs en replongeant moi-même dans dans le jeu. Si, évidemment j'aurais dû faire comme ça, mais pour aujourd'hui, on va rester sur le longplay.

Réappropriation du jeu
Oh là là cette intro, la revoir me rappelle à quel point elle m'avait filé des frissons à dix / onze ans. Elle m'a refilé les mêmes aujourd'hui. Cette mise en scène, la détresse de notre coéquipier, puis de nous-même, la musique qui multiplie la tension par cent vingt-huit. Wouuuh ! À la manière d'un RTS, on nous demande ensuite de choisir notre camp parmi deux factions : Jade Falcon et… Wolf, tout simplement. Même pas Grey Wolf, ou Crystal Wolf, pour rester dans la thématique minéral + animal. Juste Wolf. Bah appelez l'autre juste Falcon alors ! Pourquoi faire des trucs pas carrés comme ça, bordel ? Puis on arrive sur un menu uuuuultra stylé et immersif, simulant un QG secret dans lequel on emprunte les galeries pour accéder aux fonctionnalités du jeu, avec des fonds en précalculé plutôt jolis. Pour le coup, bien mieux foutu qu'un RTS de l'époque. Surtout que chaque clan a droit à son propre décor ! On a presque envie de rester à glander dans ces bâtiments, plutôt que d'aller exploser des Mechs ennemis. Essayer de les exploser, en tout cas. Mais trêve de rêvasserie. La vidéo que j'ai lancée nous envoie fissa réaliser les exercices du tutoriel. On y apprend les bases du mouvement de notre robot, dont les jambes bougent indépendamment du torse, mais aussi le tir, la navigation via le cockpit, caméra externe ou satellite, ou encore la gestion de la chaleur pour éviter de se cramer tout seul. Ouais, la chaleur. On pilote un gros tas de métal qui peut courir à plus de 150 km/h tout en tirant lasers et missiles. Forcément, ça fait appel à la thermodynamique et aux frictions de machins contre des trucs. Ça ne m'a pas fait aimer les cours de physique au collège pour autant. Peut-être parce que je n'ai jamais foutu les pieds dans ce tuto. Dommage, ça m'aurait aidé à piloter un peu moins mal, j'aurais pu réussir une mission ou deux sans me faire défenestrer de mon Mech en trois minutes par une roquette ennemie. Mon cousin ne m'aurait pas considéré une fois de plus comme un piètre disciple infichu de faire honneur à un seul de ses jeux.

En tout cas, dès le tutoriel, on nous immerge dans le bain. Nan mais quand notre bestiau se met à marcher, le bruit que ça fait ! Ces pas lourds et menaçants (les machins pèsent soixante tonnes en moyenne)... Allez, nouvelle salve de frissons ! Le son du zoom, la voix de l'IA (féminine, évidemment, aucune IA n'avait de voix masculine avant 2019, faut le savoir), le laser et son gazouillis caractéristique, la voix de notre instructeur qui nous traite de “Scrub” et de “Wet nose”... ouais d'accord, lui on aurait pu s'en passer. Ses dialogues font partie des pires clichés militaires jamais écrits, à fond dans le rôle du sergent un peu vulgaire et brutal, mais un bon gars dans le fond. Heureusement qu'on nous enrobe bien dans une atmosphère assez cool, parce que du reste, ouuuuh c'est moche. Très très moche. Je ne me rappelais pas de graphismes aussi crades. Ah nan, c'est la vidéo qui est en qualité immonde. J'en mets une autre, ça va déjà mieux. Mais bon… Très peu de décors, des montagnes en forme de pyramides, quelques bâtiments plus austères que le plus austère des HLM soviétiques. Il n'y a guère que les Mechs à qui on a réservé un traitement un peu moins drastique. En même temps, les reconnaître à bonne distance peut parfois nous sauver la vie, pour un peu qu'on s'engage dans une partie en ayant un minimum potassé les spécificités techniques de chacun. Alors j'imagine que tout le budget a dû passer dans leur modélisation. Bon, au moins, se promener dans des paysages aussi vides permet de se concentrer sur l'essentiel : détruire les robots adverses avant de se faire détruire soi-même. Tout le monde avait déjà compris, mais j'avais envie de l'écrire malgré tout.

J'y arrive, à ce cœur de gameplay, bien que je fournisse un max d'efforts pour retarder le truc. Je peux me tromper, mais je crois bien que le jeu se veut plus ou moins réaliste. Je sais, on pilote des robots géants, alors le réalisme, hein… je vois déjà les vieux réacs débarquer en se croyant malins. Bien sûr, on pilote des robots qui tirent des lasers en l'an 3045 ou pas loin ! Est-ce qu'on peut les faire se reproduire par mitochondrie pour autant ? Non ! Est-ce qu'on peut se faire livrer un kébab préparé depuis l'autre bout de la galaxie directement dans le cockpit ? Non plus ! Ça reste réaliste dans le sens où on se prend un missile dans la tronche, on a mal. On s'en prend deux, on perd la vie pour toujours. Les lois de Newton fonctionnent comme par chez nous, quoi. La théorie de Darwin aussi ; sélection naturelle, tout ça. Ne survivent dans cet univers impitoyable que les super-prédateurs et les spécimens alpha. J'ai par ailleurs entendu dire que la prise en main ne se faisait pas aussi facilement que dans… disons Ridge Racer. Ouais, comparaison pas ouf, mais je n’ai pas de référence de jeu de pilotage de robots prenant quelques libertés avec la gravité, l’inertie et touts ces paramètres compliqués. MechWarrior aurait pu s'appeler Mech Simulator. Pas de moves de taré ou d'acrobaties improbables, ici, je rappelle qu'on conduit un énorme bipède métallique plus lourd qu'une vieille locomotive diesel. Dont le torse se dirige indépendamment des jambes, hein. Pour ceux qui galéraient déjà à viser un ennemi à deux mètres dans Counter Strike (comme moi), vous pouvez oublier les exploits militaires ici.

Toujours dans ce souci du réalisme, nos Mechs sont tous constitués de la même manière. Deux bras, deux jambes, et un torse, lui-même divisé en trois parties. Quand on touche un ennemi au bras, son bras prend des dégâts. On peut donc neutraliser un adversaire en lui détruisant les bras, là où se trouvent ses armes. Ah, ils en ont sur les épaules aussi (faisant partie du torse, le haut du torse, d'accord). Bon, euh, mieux vaut tout faire péter d'un coup, alors. N'empêche que c'est rigolo de voir un robot s'arrêter au milieu de nulle part, privé d'une de ses pattes. Et pour arriver à ses fins, on dispose d'un arsenal assez dingue. Dix-huit Mechs différents, spécialisés dans un rôle bien précis (combat à distance, combat rapproché, hit and run… etc.), à nous ensuite de les personnaliser selon nos affinités. Ajouter une mitrailleuse lourde, remplacer le lance-missile par un blindage supplémentaire, renforcer l'armure des jambes ou au contraire augmenter la vitesse, installer de l'équipement pour mieux dissiper ou encaisser la chaleur… trop d'options disponibles ! Tout ça sans prendre en compte le contenu additionnel. Et puis cette classe improbable dans les noms des robots, quoi. Firemoth, Hellbringer, Mad Dog, Summoner… autant y aller à fond, j'avoue. Avec mon cousin, je crois qu'on choisissait toujours un Mech parmi les plus lourds et les plus bourrins, qu'on bardait le plus possible de canons et munitions. Un peu comme on veut toujours rouler en 150cc à Mario Kart, déglinguer le monde entier au RPG dans Duke Nukem, ou finir les parties de Command & Conquer à coups de cinquante tanks mammouth. Ça ne fonctionnait pas mieux, mais on y croyait.

Le jeu nous trimballe sur une bonne quinzaine de missions par clan, histoire de nous familiariser avec toutes les options disponibles. Si les objectifs varient un peu, entre combat frontal, escorte, libération de prisonniers, ça se résume finalement à tout tabasser. Qui s'en plaindrait, hein ? Bah moi, quand je faisais partie des tabassés. Ça m'arrivait souvent. Je l'ai déjà mentionné ? C'est que ça m'a plus traumatisé que je ne l'admettrai jamais. Heureusement, on pouvait souvent embarquer des alliés avec nous, gérés par l'IA, et donc pas forcément très futés. Mais ça me rassurait, quelque part. Et puis la possibilité de customiser leur équipement à eux aussi me hypait plus que jamais. Pour ceux qui auraient réussi mieux que moi à dompter ce jeu, deux extensions ont vu le jour, ajoutant un troisième clan, une nouvelle campagne et une foule de nouveaux robots. Des musiques en plus aussi ! Ah et sinon, j'ai un vague souvenir que l'on pouvait s'éjecter de son Mech et continuer le combat en tant que simple humain minuscule. Enfin, ça revenait à se faire trancher en deux par un laser, ou se faire écrabouiller par un énorme pied d'acier, mais je n'ai pas retrouvé de gameplay là-dessus. J’ai l’impression très nette d’avoir pourtant déjà vécu ce genre de moments in-game, et je vous assure que ça faisait bien flipper. Je lance un appel à témoins, au cas où ça rappelle quelque chose à quelqu'un.

Nouvelle plongée dans l’OST
Je ne connais absolument pas Jeehun Hwang, qui a livré un travail sur la musique au moins autant salué que le gameplay, sinon plus. Je me base sur une poignée de commentaires YouTube pour affirmer ça, mais en général, si les premiers que l'on lit sur une vidéo de playthrough concernent majoritairement la musique, on peut affirmer avoir affaire à une superbe B.O. sans risquer de se tromper. Le fait que je ne m'en souvienne plus ne signifie pas le contraire. Il y a plein d'autres OST mémorables que j'ai injustement oubliées. Bah franchement ! Monsieur Hwang n'a pas volé sa réputation, en effet ! Y aurait pas de la vibe Terminator là-dedans ? Oh que si ! De grosses percussions bien lourdes, des mélodies dépressives jouées par des synthés qui ont dit adieu au bonheur. Ouhouhou que ça fait du bien ! Parfois, des variations un peu plus optimistes s'incrustent et rappellent Shadow of the Horned Rat. “Un combat au sommet entre Morgan Bernhardt et le T-800”, ça aurait la classe, comme accroche, nan ? Bon, j'imagine pas le massacre. Pauvre Morgan. Au détour de quelques morceaux, je jurerais entendre un theme de Starcraft, voire même un peu de trip-hop à un moment ! Mais peut-être que je cherche un peu trop loin. En tout cas, ce mélange d'influences accompagne parfaitement les chamailleries à grande échelle que se livrent nos petits robots chéris. Si je n’avais pas autant adoré la B.O. de Total Annihilation, j’aurais aimé qu’elle ressemble à ça. Dans la plupart des futurs imaginés dans les années 90, on ne s'amuse pas beaucoup. MechWarrior 2 ne fait pas exception.
MechWarrior 2 - Blade Splint, Cold Crescent, Wolf Trial 3
Regrets ou pas ?
Tiens, ça me revient. Mon cousin me l'avait prêté, ce jeu. J'avais sans doute râlé un peu quand il a refusé d'y rejouer avec moi, alors qu'une pile de vingt CD-ROM attendait de se faire installer sur son disque dur. J'ai essayé d'apprivoiser les codes d'un bon MechWarrior, joystick en main, avant de me rendre compte que j'allais investir trop de temps dedans pour en tirer quoi que ce soit. Mais quand je vois avec quelle émotion en parlent les gens qui l'ont mieux connu, j'ai une envie qui monte de me mordre les doigts jusqu'au sang. Activision à cette époque, ça développait de sacrés trucs, n'empêche. Entre ça, Pitfall : the Mayan Adventure… et euh… enfin plein de trucs ! Ça a bien changé depuis ! MechWarrior 2 reste d'ailleurs le dernier jeu de la franchise BattleTech qu'ils ont créé (l'extension Mercenaries en réalité, si on veut chipoter). J'avais testé la démo du 3, je l'avais trouvé magnifique, il y avait un effet de flou dû à la chaleur quand on tirait un laser ! La dinguerie, quoi ! Je n'ai pas cherché plus loin que ça, et je me demande bien pourquoi. Peut-être par crainte de me ramasser encore. En tout cas, j'aurais dû persévérer un peu sur le 2, tant que j'y avais accès. Au lieu de… je sais pas moi, me retaper Wipeout, Worms ou Warcraft II en boucle. Oui d'accord, je ne referais sans doute pas différemment si j'avais le choix de recommencer. En tout cas, il n'y avait pas que Warhammer pour associer figurines et jeux vidéo stylés. BattleTech s'en sortait plutôt bien aussi.
