Robocop vs. The Terminator (Mega Drive, 1994 au Japon et en France)

Type de jeu
Manuel officiel de formation destiné aux CRS, pour leur apprendre à calmer les manifestants à base de sulfateuse et grenades à fragmentation.

Premier contact
Si je ne me trompe pas, c’est encore grâce à mes voisins ultra branchés que j’ai eu vent de cette merveille prônant violence et mauvais goût (le bon mauvais goût évidemment). Je ne sais pas comment ils faisaient pour dénicher tous ces trucs. Ils squattaient les boutiques, sûrement. Je n'avais pas l'âge pour y aller seul ou avec eux, moi. En tout cas, je n’avais pas l’âge pour jouer à ça non plus ! Mais à l’époque, on se fichait un peu de toutes ces considérations. Et puis, ma mère avait beau faire la guerre aux films “trop durs” pour nous, elle méprisant tellement les jeux vidéo qu'elle faisait comme s'ils n'existaient pas. Par conséquent, elle n’a jamais eu vent des horreurs qu'on ingurgitait via ce médium… même quand elle passait à un mètre de la télé. Haha ! On t’a bien eue sur ce coup-là.

Retour sur expérience
J’ai toujours considéré ce jeu comme un plateformer, mais on passe plutôt son temps à tirer au flingue qu’à sauter. Aux antipodes de Quackshot, où Donald laisserait la place à un flic robotisé au sang-froid implacable, et où les énormes guns remplaceraient les mignonnes ventouses colorées. J’ai tout de suite accroché au parti pris d’exploser et démembrer tout ce qui bouge, dans un festival sanguinolent au possible. Jamais ma mère ne m’aurait laissé exterminer autant d’êtres humains (et de robots) en toute connaissance de cause, si elle avait daigné poser les yeux sur l’écran de la télé lors d’une partie. Eh, sans rancune hein. Il fallait voir le déluge de chaos que je faisais pleuvoir sur Detroit et les autres niveaux plus ou moins inspirés de ce crossover bizarre (qui nous vient d’un comic book il me semble) ! Robocop avait beau faire partie des forces de police, il se foutait pas mal d’assassiner des dizaines de personnes par minute, aussi mal intentionnées fussent-elles. Ça ne m’a pas rendu psychopathe pour autant ; comme quoi, les jeux vidéo ne créent pas toujours de futurs tueurs de masse, bien qu’on essaie toujours de nous le faire croire une fois de temps en temps. Peut-être ai-je failli perdre la raison quand même, allez savoir. En tout cas, expert en armes à feu diverses et variées, j’aurais pu le devenir, vu l’arsenal qu’on nous met à disposition, du petit flingue de base au fusil à pompe qui tire des petites roquettes, en passant par le canon laser capable de vaporiser un T-800 en un coup, ou encore un lance-grenades aux projectiles dirigeables en même temps qu’on se déplace. On ne joue pas à un plateformer du tout, même si Robocop s’accroche à des barres métalliques en mode Ninja Warrior. Et qu’est-ce que j’y connaissais au terme Run and Gun en 1994 ? Rien du tout, voilà.

Flashback spécial ambiance
J’ai toujours regretté de ne pas pouvoir incarner le Terminator dans ce bain de sang urbain et dystopique. Judgement Day avait déjà conquis mon cœur en devenant mon film préféré, alors que les aventures de Robocop au cinéma, j’aimais un peu moins. Mais une fois la partie lancée, j’oubliais vite mes préférences, le rythme jouissif m’empêchait d’intellectualiser quoi que ce soit. Les mécaniques de jeu semblaient peut-être simplistes et parfois un peu bourrines, mais il flottait dans ce jeu un parfum de pessimisme extatique qui rattrapait tout le reste. La silhouette fantomatique de Detroit au second plan des premiers stages, l’usine de déchets toxiques, la caverne servant de QG terroriste à un mètre au-dessus du niveau du magma terrestre, l’antre de Skynet lui-même… de quoi ravir les rabats-joie du monde entier. La face sombre des années 90 dans toute leur splendeur : cristallisant les émotions fortes liées à l’approche de l’an 2000, le futur ! Bordel ! Un futur rarement radieux, par contre. Il valait mieux vivre au jour le jour que d’espérer quoi que ce soit du troisième millénaire. Dans mes mauvais jours, j’adhère totalement à cette maxime.

Réécoute de la bande-son
La musique flirtait souvent avec les limites de l’improbable en mettant à mal les capacités sonores de la console. D’un autre côté, ce son particulier, métallique et industriel, correspondait tout à fait au climat violentissime du jeu. Un DJ de Detroit aurait signé cette B.O. que ça ne m’étonnerait pas. Mais non, Mark Miller n’a pas l’air d’avoir écumé les clubs de Motor City, il a surtout bossé sur d’autres machins, du type Kid Chameleon ou Earthworm Jim. Pourtant, certains morceaux dégagent une telle énergie qu’ils pourraient encore passer en boîte aujourd’hui (en prévenant bien les gens à l’avance, cela dit). D’autres font un peu plus mal aux oreilles et serrer les dents ; mais ça nous donne d’autant plus envie de tout dégommer, pour qu’enfin s’arrête cette torture auditive. Et puis, ça colle avec la rigidité quasi-zombiesque de Robocop. Celui des premiers films en tout cas.
Robocop vs. The Terminator - Flight Term
Moment Nostalgie
Ma grande sœur a tout autant adhéré que moi au concept de mitraillage continuel de méchants super méchants. On jouait souvent ensemble, à s’échanger la manette dès que l’un d’entre nous perdait une vie. Pendant ce temps-là, l’autre faisait l’idiot en dansant sur la musique. Le morceau qui accompagne le premier niveau est devenu légendaire pour nous, avec ce sample de voix complètement barré qu’on adorait imiter. Comme pour Altered Beast, on se regardait, on faisait parler notre plus beau yaourt, et on s’embarquait dans une session de fous rires sans fin. “Co-manèèère”, qu’on disait (on n’avait pas beaucoup progressé en anglais, depuis nos premiers pas sur la Mega Drive). Je n’ai jamais su quels mots prononçait réellement le “chanteur”. Tout compte fait, je préfère ne jamais l’apprendre.

Instant le plus stylé
Arriver contre le boss final avec trente-cinq vies (le jeu n’avait rien de bien difficile), se poser devant et le canarder sans bouger, perdre dix vies mais gagner quand même.
