Les jeux précédés de la balise [SUITE OUBLIEE] concerne les suites de titres que j'ai adorés, mais auxquelles je n'ai jamais joué. Et donc j'en parle... toujours sans y avoir joué ! Parce que ? Parce que.
Streets of Rage 3 (Mega Drive, 1994)
Relation avec le jeu précédent, et pourquoi je n’ai pas persévéré
Streets of Rage 1 reste un monument de nostalgie pour moi. Je me souviens de chaque lancement de partie, chez mon pote chez qui je jouais aussi à
Golden Axe, un gars encore plus fan de Dragon Ball que moi (pas de rapport, mais j’ajoute du lore, comme ça). Une fois arrivés au dernier niveau, vu qu’on ne pigeait pas un seul mot d’anglais, on choisissait au pif “oui” ou “non” lors du discours du boss final, en espérant avoir pris la décision de l’affronter, et pas de clore l’aventure sans climax. Bizarrement, je ne sais plus où ni quand j’ai fait mes armes sur le second opus ; mes voisins me l’avaient peut-être prêté, ou alors j’y ai joué chez l’un de mes autres potes qui avait une MD. J’ai beaucoup moins bûché dessus, alors que je l’ai aimé presque tout pareil que le précédent. Et le troisième volet, alors ? Jamais touché, sûr et certain ! J’ai appris son existence bien plus tard ; ma console avait alors rendu l’âme depuis longtemps. Quand j’y repense, ça me paraît juste inconcevable. Comment ai-je pu passer à côté d’un titre dont j’avais autant adoré les ancêtres ? Avoir manqué les suites de
Golden Axe paraissait déjà assez ahurissant comme ça, il a fallu que je persiste en jetant la franchise Streets of Rage aux oubliettes ; c’est con l’enfance, des fois.

Améliorations et nouveautés ?
Comme on pouvait s’y attendre, Streets of Rage 3 propose le pack classique : suite de l’histoire (juste suite hein, pas renouvellement), nouvelles attaques disponibles (mais toujours pas le retour de la bagnole de flics, bouh), nouveaux ennemis en plus des caïds déjà connus, nouveaux personnages jouables, quelques améliorations au niveau de l’interface et du feedback (comme la barre de vie des objets que l’on ramasse). Le tout balancé dans des stages flambants neufs ! Jusque-là, tout va bien. Mais concrètement, ça donne quoi ? Le grand méchant, qu’on a déjà marave deux fois quand même, revient ENCORE, plus fort que jamais, aux commandes d’une armée de robots, de surcroît (maintenant, les ennemis explosent au lieu de disparaître, un point pour les lois de la physique). Là ou ça passe encore dans un univers totalement inventé comme celui de
Sonic, ça la fout un peu plus mal dans le monde quasi-réaliste de Streets of Rage. Mais va-t-on en tenir rigueur aux développeurs ? Non, on est là pour se taper dessus. Le reste, on s’en… euh, on s’en tape, tout à fait.

Du côté des combattants que l’on peut incarner, on retrouve nos amis Axel le grand beau-gosse blond bien sous tout rapport, Blaze la jeune fougueuse bien foutue caution male gaze trop bonne et même pas idiote, mais toujours pas Adam, qui aurait décliné l’offre de sauver le monde, parce que trop “occupé”. Logique, je me dis la même chose quand j’ai mis des pommes de terre au four. Heureusement, il oblige de nouveau son fils préado (ou son petit frère, je sais plus) à affronter le crime à coups de roller dans les tibias, au lieu de le laisser jouer à la console, comme tous les gosses de son âge. Good parenting ! Le gros catcheur de Streets of Rage 2 a visiblement pris sa retraite (peut-être pour aller cuisiner un poulet lui aussi), et on se voit gratifiés d’un vieillard reconverti en semi-cyborg à la place. Pourquoi pas, on ne va pas râler pour ce genre d’aberrations, surtout quand on apprend l’identité des trois autres gars possibles à débloquer (ouais que des gars) : un ninja insipide (synonyme de ténébreux ici), un kangourou affublé de gants de boxe, et attention, là ça devient intéressant, un grand moustachu, tout de cuir vêtu, qui se balade en sautillant sur la pointe des pieds, les genoux orientés vers l’intérieur. Et encore, je ne parle pas des mouvements maniérés de ses mains. Ouh, le malaise, il faut le voir pour le croire. Peut-être que ça faisait rire au milieu des années 90, mais ce concept de Village People caricaturé à outrance sent très mauvais aujourd’hui (il n’existe d’ailleurs que dans la version japonaise du jeu). Manquerait plus que Blaze la jolie gonzesse se mette à emmerder son monde pendant ses règles, tiens ! Ah, bah c’est bien le cas, vu que dans sa fiche d’identité, on nous précise qu’elle a perdu son boulot de flic à cause de ses crises de colère. Rien à jeter là-dedans, pas vrai ?

Tout ce mélange bizarre donne l’impression d’un début d’essoufflement de la part des développeurs, comme s’ils avaient manqué d’inspiration (inspiration, essoufflement, emoji vent, emoji qui pleure de rire). Rien qu’à voir le design des niveaux, on constate que ça tourne un peu en rond. Enfin, voyons, pour un troisième jeu de franchise unanimement reconnue comme Streets of Rage, les graphistes auraient pu se lâcher un peu, non ? Au final, on tombe dans le vu et revu des jeux précédents. Et sinon, pour du 16 bits de 1994, ça ne vend pas du rêve question visuels, background et personnages confondus, hein. Les stagiaires avaient pris la place des directeurs artistiques ou quoi ? J’y vois un certain parallèle avec
Sonic 3, qui lui aussi galère un peu à nous séduire, avec son charisme de hérisson écrasé sur l’autoroute. Coïncidence au niveau du chiffre trois, ou de l’année 1994 ? A-t-on le droit d’espérer un peu plus de folie, quand on connaît déjà par cœur les deux chefs-d'œuvre précédents ? L’industrie vidéo-ludique nous répond non, du moins sur ce coup-là.

Comparaison entre les bandes-son
J’ai découvert la bande son sur un site assez génial nommé
Greatest Game Music. Et je dois avouer que pour la première fois de ma vie, j’ai trouvé les compos de Yuzo Koshiro un tout petit peu décevantes. Ça reste du travail d’orfèvre, mais peut-être pas assez accessible, trop en avance sur son temps, ou alors pas adapté à la Mega Drive, qui souffre un peu face aux sons qu’on lui demande de produire. Pauvre bête. Les morceaux demandent un certain temps d’adaptation avant de ne plus faire grincer des dents. Ça veut sonner comme de la bonne techno / gabber / trance, mais ça n’y parvient pas forcément à chaque coup. Néanmoins, j’ai eu un coup de cœur pour un titre en particulier ; celui qui accompagne la “mauvaise fin”, où les héros rejoignent le camp des méchants. Il possède une telle puissance, une telle vibe qui colle parfaitement à la console, que j’en ai eu des frissons de nostalgie sans même avoir touché au jeu ! Sérieux, je ne croyais pas ça possible. Rien que pour The Poets I, donc, Yuzo Koshiro mérite mon admiration éternelle. Le mec qui aura réussi à me rendre mélancolique d’un truc que je n’ai pas vécu. Purée, c’est fort.
Streets of Rage 3 - The Poets I
Conclusion sans suite
Maintenant que j’ai un peu démonté ce jeu, je peux me poser la question : est-ce que les défauts que j’ai relevés aujourd’hui auraient eu un quelconque impact sur moi à dix ans ? Non, que dalle, je m’en serais foutu, mais d’une force ! Car en dépit de toutes mes critiques, Streets of Rage 3 reste ultra jouissif, hyper pêchu, super bien calibré. Le rythme enfiévré nous embarque malgré nous dans une frénésie irrépressible, les niveaux s’enchaînent sans anicroche, les cadavres des ennemis (enfin les carcasses de robots) s’accumulent comme autant de petites briques d’une jolie pyramide. Le cocktail explosif imaginé dès le premier du nom fonctionne toujours à merveille. Et aussi, les décors autant que les sprites nous régalent les yeux. Streets of Rage 3 n’atteint pas le statut de légende indépassable, mais uniquement parce que ses aïeux l’ont déjà décroché avant lui. Qu’il n’ait pas pu les surpasser ne m’aurait jamais empêché de prendre un pied fou dessus. Et ouais, Ash le gay ridicule aurait été mon perso préféré ; peut-être pas pour les bonnes raisons, cela dit. Comme presque tous les gosses de mon âge, les vannes homophobes nous faisaient beaucoup marrer. Aucune nostalgie qui me reste de ce genre d’humour, tiens.
